II- La perception de la perspective

La lumière illumine le monde puis atteint directement ou indirectement notre rétine sur laquelle elle forme des images inversées des objets comme sur le schéma ci-dessous:

Ces images rétiniennes sont composées de deux dimensions (X et Y): elles ont perdu les informations de profondeur (Z), à savoir la distance entre la rétine de l'observateur et la surface d'où provient la lumière. Cependant, nous sommes tous capables de percevoir notre environnement en 3D. Comment donc, à partir d'une image en 2D, arrivons nous à la perception d'un monde visuel en 3D?

Plusieurs facteurs expliquent cela. Tout d'abord, la projection d'un point de l'espace sur un plan est une fonction géométrique bien définie. Chaque point de l'espace a des coordonnées cartésiennes (x,y,z). Pour se projeter sur un plan en D, elles vont perdre une de leur coordonnées et/ou vont modifier les deux autres. Ainsi il existe plusieurs type de projeté, la plus communément utilisé étant la projeté orthogonal qui consiste à donner à chaque point de l'espace A un point A' du plan P tel que (AA') soit perpendiculaire à P. Seulement, si l'on peut projeter un point d'un espace en 2D sur un espace en 3D, l'inverse est impossible. En effet, pour chaque point d'un plan, il existe une infinité de points dans l'espace, étant donné justement que l'information de profondeur (Z) est justement manquante. Pour palier à ce problème, notre système visuel va émettre des hypothèses sur la nature de notre environnement et sur les conditions dans lesquelles il est vu. Il prédit quel monde en 3D a donné naissance à de telles images rétiniennes en 2D.

De la même façon, notre illusion de la profondeur nous est donné par le fait que l'on ai deux yeux et donc deux rétines. Les deux rétines n'étant pas parfaitement parallèles et donc pas colinéaires, les images se juxtaposent pour donner une image en 3D, qui, ajoutée à l'argument précédent va expliquer le fait que notre perception visuelle soit en 3D.

Ainsi, notre perception visuelle du monde est une construction fondée sur de nombreuses prédictions.

1)Distance des objets, convergence du cristallin

Afin d'estimer la taille réele d'un objet, le cerveau va exploiter trois données. Dans un premier temps il va se servir de la taille de l'image que forme l'objet sur la rétine. Plus un objet est loin et plus l'image formée sur la rétine est petite.

Dans un second temps, le cerveau va se servir des informations de convergence des yeux fournis par ces dernier. En effet, plus un objet est loin est plus le cristallin devra converger, c'est à dire modifier son angle de courbure: c'est l'accommodation. Ainsi, plus cette angle est important et plus l'objet observé est loin.

Enfin, le cerveau va exploiter les données de taille relatives acquises depuis la naissance; depuis notre naissance nous avons acquis de nombreuses données permettant d'estimer avec plus ou moins de précision la taille d'un objet. Ces données sont ré exploitées par le cerveau pour permettre de « peaufiner » l'estimation de la taille de l'objet observé.

Ces trois sources d'information nous permettent de pouvoir estimer avec une assez bonne précision la taille des objets, qu'ils soient lointain ou non.

2)Expérience du verre

Quels sont les différents indices nous permettant de percevoir la taille des objets? Quelle taille attribuons-nous aux objets en fonction de ces différents indices? Un objet lointain, qui forme une petite image sur la rétine sera t-il perçu plus petit, plus grand ou de taille égale à l'objet identique proche qui forme une grande image sur la rétine? Pour ces répondre à ces questions nous proposons un dispositif expérimental: l'expérience du verre.

Nous remarquons que les deux verres apparaissent de même taille, bien que l'un soit proche de vous et l'autre distant.
Les verres ont des tailles différentes. Les deux verres vous apparaissent à nouveau de tailles différentes. Donc le verre distant semble être plus petit que le verre proche.

Que s'est-il donc passé dans cette expérience? Nous venons tout simplement de faire connaissance de la constance de grandeur.

Du fait de son éloignement, le verre qui est distant forme sur la rétine une petite image, alors que le verre proche forme une grande image. Or, nous savons que ces deux verres sont identiques, donc de même taille. Pour que notre vision corresponde à nos informations mémorisées, nous faisons appel à la constance de grandeur.

Elle permet de compenser le rapetissement de l'image rétinienne avec la distance, en augmentant « perceptivement » la taille de l'objet distant.

Ainsi, lorsque vous percevez les deux verres de même taille, la constante de grandeur est entrée en jeu, et a « augmenté » la taille perçue du verre qui est distant.

La constance de grandeur est cependant un processus inconscient qui ne s'applique pas toujours. Par exemple, elle n'intervient pas lorsque les objets de même taille sont près l'un de l'autre, comme lorsque vous rapprochez vous deux bras. Elle n'intervient pas non plus quand la taille des images rétiniennes est très différente, comme entre l'image d'un chihuahua et celle de son maitre basketteur. Et enfin, elle n'intervient pas lorsque vous réduisez les informations de profondeur, comme en fermant un oeil par exemple.

3)Illusion de Ponzo

Cette illusion a été créée en 1913 par le psychologue italien Mario Ponzo. Elle représente deux ligne horizontales parallèles cernées de deux lignes convergentes. Elle peut être expliquée en faisant référence à la constance de grandeur

Nous avons l'impression que la ligne horizontale supérieure est plus longue que la ligne inférieure. Pourtant, si vous mesurez ces deux lignes horizontales, vous verrez qu'elles sont de même taille.

Tout se passe comme si nous percevions à partir de ce simple dessin en 2D, une image en 3D: les lignes convergentes nous donnent des indices de profondeur et de perspective...elles nous font en fait penser aux rails de chemins de fer, les lignes horizontales symbolisant les traverses en bois.

Donc, pour apprécier la taille des lignes horizontales, nous allons utiliser les mêmes principes de détermination de la taille que dans la réalité, et nous allons appliquer la constance de grandeur. Les deux lignes horizontales ont la même taille, tout comme leurs images rétiniennes, mais les indices de profondeur indiquent que la ligne supérieur est éloignée. La constance de grandeur joue son rôle de compensation, ce qui augmente la taille perçue de cette ligne par rapport à la ligne inférieure: la ligne supérieure nous paraît ainsi plus grande.

Conclusion

Ainsi, la perception de la perspective, c'est à dire la perception de la profondeur et de la taille des objets, se fondent sur plusieurs indices:

Le premier est la taille de l'image formée sur la rétine

Le deuxième est la distance d'un objet par rapport à nous, estimée grâce aux informations de convergence en provenance de nos deux yeux. Ainsi que les indices de profondeur et de perspective suggérés par l'image perçue.

Le troisième est la taille relative des objets les uns par rapport aux autres, que nous avons accumulée et mémorisée depuis notre naissance, tout au long de l'apprentissage de notre environnement. Elle se manifeste sous la forme de la constance de grandeur.


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